On en voit de plus en plus de ces vies dans la rue, sans abri, sans toit. Leur espace se résume à une tente, ou un matelas. Guère plus. C’est un cri…un homme se met littéralement à hurler dans la rue. Il s’époumone. Totalement imperméable aux passants qu’il ne voit même pas. Arraché à toute réalité, il pousse des cris prolongés. Des cris de haine. Des cris de douleur. Des cris de colère.
Il sort sa rage. Il invective un être imaginaire. Maléfique, peut-être ? Est-ce son son habitude de répéter, chaque jour, chaque heure, qui sait ? Les passants le toisent, le recouvrent d’indifférence, d’ignorance et de mépris. J’imagine que cela fait des mois, des semaines, qu’il doit errer ainsi avec pour seule certitude celle qu’il n’y a plus d’humanité. Qui viendra lui tendre la main ? Qui sera là pour l’écouter ? Certains disent que c’est seulement l’égoïsme qui empêche de considérer l ‘autre. Incarner tout et rien à la fois, est-ce normal ?
Après ses cris c’est encore ses cris. Ses échos. Ses résonances. Des mois que cela enfle telle une rumeur, pire, que cela se propage jusqu’au cœur. Et ce regard qui dit : tu ne m’aimes donc plus, toi ? Toi aussi, devrais-je dire. Qui sera là pour lui répondre ? Vous ? Moi ?
On ne les rencontre jamais ces êtres-là. Parle encore. C’est ta folie qui se répand et ça fait du bien. Elle peut nous assassiner sur le moment, certes mais elle me semble si juste, si vraie et si fraîche. Il faut lui rendre cet espoir. Ce fût une libération de chercher à capter son regard. Je me demande qui est capable de les entendre ses cris à maintenant. Je me demande qui saura ne pas le traiter comme fous hystérique ou aliéné. Qui aura ce courage-là ?
Isabelle franc rttr
texte protégé
010446g
16 décembre 2017 à 7 h 31 min
pire encore sont les cris silencieux de ceux qui meurent sans un mot
Dernière publication sur le radeau du radotage : A l'école de théâtre